Pratiques commerciales trompeuses : jusqu'à 5 ans d'emprisonnement et 750 000€ d'amendes (modification Code de la Consommation / loi contre les dérives sectaires)

Votée à l’assemblée le 9 avril dernier la loi n° 2024-420 visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l’accompagnement des victimes a été publiée et est en vigueur depuis le 10 mai 2024.

Cette loi renforce les sanctions, notamment dans le cas d’état de sujétion psychologique ou physique et dans les cas de provocation de l’arrêt de traitements médicaux. Elle constitue une réponse à un phénomène qui constitue avant tout une mise en danger des citoyens et qui, vraisemblablement, nuit à l’image de nos professions.

Nous pouvons penser que les contrôles de la DGCCRF auprès des professionnels des thérapies complémentaires vont se multiplier au cours de l’année à venir, comme semble le confirmer les cas que vous nous remontez. D’autant plus que les sanctions sont également alourdies en cas de pratiques commerciales trompeuses.

Si vous n’avez pas encore mis à jour vos supports de communication en fonction des recommandations du SUP-H, nous vous conseillons vivement de le faire rapidement. Pour rappel, vous trouverez ces recommandations dans le Guide d’activité ; Vous pouvez également trouver la lettre d’information client, l’affiche cabinet et les chartes de déontologie sur le site sup-h.org. Nous nous tenons, dans la mesure du possible, à votre disposition pour répondre à vos questions.

 Vous trouverez ci-dessous une rapide synthèse de ce texte de loi.

Que dit le texte de loi  ?

  • Cette loi s’organiser autour de 7 chapitres dont le premier consacre les pouvoirs de la MIVILUDES en matière de lutte contre les dérives sectaires : information, analyse, favoriser  – dans le respect des libertés publiques – la coordination de l’action préventive et répressive des pouvoirs publics ; lien avec le ministère de l’éducation nationale pour intégrer la sensibilisation des élèves aux dérives thérapeutiques et sectaires dans les programmes de l’enseignement secondaire ,  développer l’échange entre les services publics des informations sur les pratiques administratives dans le domaine de la lutte contre les dérives sectaires …
  • Les chapitres suivants facilitent et renforcent les poursuites pénales (Chapitre II), la protection des mineurs victimes de dérives sectaires (chapitre III) et renforcent la protection des victimes (Chapitre IV) : 
  • La récidive : diffusion de messages destinés à la jeunesse et faisant la promotion d’une personne morale qui poursuit des activités ayant pour but ou pour effet de créer, de maintenir ou d’exploiter la sujétion psychologique ou physique des personnes qui participent à ces activité, «  lorsque a été prononcée au moins une fois, contre la personne morale elle-même ou ses dirigeants de droit ou de fait, une condamnation pénale définitive » pour certaines infractions (exercice illégal de la médecine, publicité mensongère notamment) : amende pouvant aller jusqu’à 1 million d’euros dans le cas de personnes morales.
  • Emprise et détournement d’un traitement médical  :  1/ Conduire une personne à un acte ou à une abstention qui lui sont gravement préjudiciables, que ce soit par abus frauduleux de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse, ou en plaçant et maintenant une personne dans un état de sujétion psychologique ou physique résultant de l’exercice de pressions graves ou réitérées ou de techniques propres à altérer son jugement :  trois ans d’emprisonnement et de 375 000 euros d’amende ( Jusqu’à 7 ans et 1 million d’euros d’amende si communication en ligne ou en bande organisée – Code Pénal), possibilité de perdre les droits civiques, civils et de famille…2/  Intégration de l’état de sujétion psychologique ou physique connu de l’auteur dans les peines encourues en fonction des conséquences pour la personne victime (Code pénal). Exemple : « Le meurtre est puni de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’il est commis » : (…)  3°Sur une personne dont l’état de sujétion psychologique ou physique, au sens de l’article 223-15-3, est connu de son auteur. 3/ Extension des juridictions, impact sur le code de l’éducation et le Code général des Impôts.    Prescription portée à 10 ans à compter de la majorité lorsque les faits sont commis sur des mineurs…
  • Le Chapitre 5 s’intitule « Protéger la santé » et consiste dans une première partie à alourdir les sanctions en cas de communications en ligne, que ce soit dans les pratiques commerciales trompeuses (Code de la Consommation) ou dans l’exercice illégale de la médecine, de la pharmacie, de la profession d’infirmier, de masseur-kinésithérapeute et de biologiste médical (Code de la Santé). Exemple : Les pratiques commerciales trompeuses mentionnées aux articles L. 121-2 à L. 121-4 sont punies d’un emprisonnement de deux ans et d’une amende de 300 000 euros. Il est ajouté le paragraphe suivant : « Lorsque l’infraction a été commise par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ou par le biais d’un support numérique ou électronique, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 750 000 euros d’amende. »
  • La deuxième partie de ce chapitre 5 consiste à la création d’un article du Code Pénal dans la section des risques causés à autrui : L’Article 223-1-2. Voici son texte son dans intégralité :

 « Est punie d’un an d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende la provocation, au moyen de pressions ou de manœuvres réitérées, de toute personne atteinte d’une pathologie à abandonner ou à s’abstenir de suivre un traitement médical thérapeutique ou prophylactique, lorsque cet abandon ou cette abstention est présenté comme bénéfique pour la santé de la personne concernée alors qu’il est, en l’état des connaissances médicales, manifestement susceptible d’entraîner pour elle, compte tenu de la pathologie dont elle est atteinte, des conséquences particulièrement graves pour sa santé physique ou psychique.

Est punie des mêmes peines la provocation à adopter des pratiques présentées comme ayant une finalité thérapeutique ou prophylactique alors qu’il est manifeste, en l’état des connaissances médicales, que ces pratiques exposent à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente.
Les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende lorsque la provocation prévue aux deux premiers alinéas a été suivie d’effet.
Lorsque les circonstances dans lesquelles a été commise la provocation définie au premier alinéa permettent d’établir la volonté libre et éclairée de la personne, eu égard notamment à la délivrance d’une information claire et complète quant aux conséquences pour la santé, les délits prévus au présent article ne sont pas constitués, sauf s’il est établi que la personne était placée ou maintenue dans un état de sujétion psychologique ou physique, au sens de l’article 223-15-3.
Le signalement ou la divulgation d’une information par un lanceur d’alerte dans les conditions prévues à l’article 6 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique ne constitue pas une provocation au sens du présent article.
Lorsque les délits prévus au présent article sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. »

  • Le Chapitre 6 facilite l’information des acteurs judiciaires sur les dérives sectaires et concerne les cas de levée du secret professionnel auxquels sont soumis les professionnels de santé conventionnelle. Et le Chapitre 7 concerne des « dispositions diverses » dont nous retenons : « Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport portant sur l’utilisation des titres professionnels par des personnes exerçant des pratiques de santé non réglementées. Ce rapport examine l’effet de l’utilisation de ces titres sur les dérives thérapeutiques à caractère sectaire, sur la protection des patients et sur l’intégrité des professions médicales, recense les cas d’usurpation de titre et évalue l’efficacité du cadre législatif dans la prévention de telles pratiques.»