Un texte de loi contre les dérives sectaires

Les députés ont définitivement adopté, ce mardi 9 avril, le projet de loi « visant à renforcer la lutte contre les dérives sectaires et à améliorer l’accompagnement des victimes.

« Une multitude de groupes ou d’individus investissent, notamment, les champs de la santé, de l’alimentation et du bien-être, mais aussi le développement personnel, le coaching, la formation », relève l’exécutif dans l’avant-propos du projet de loi examiné au Palais-Bourbon. Pour lutter contre ce phénomène, le gouvernement souhaite surtout renforcer l’arsenal législatif en créant de nouveaux délits

 

Comment protéger sans atteindre aux libertés ?

Ce projet de loi a connu de nombreux allers-retours depuis novembre dernier entre l’assemblée et le sénat, illustrant les difficultés à trouver la bonne formule pour lutter contre les dérives sectaires. Les oppositions se sont élevées en qualifiant le texte de liberticide ou de « faiblard » :

        dans son avis de novembre dernier, le Conseil d’État alertait sur le risque que cela remette en cause « la liberté des débats scientifiques et le rôle des lanceurs d’alerte » ;

        il estimait qu’empêcher « la promotion de pratiques de soins dites « non conventionnelles » dans la presse, sur Internet et les réseaux sociaux » constituerait « une atteinte portée à l’exercice de la liberté d’expression » ;


 

–        le texte est pour certains trop porté sur le « répressif », plutôt que sur la prévention : « Ces pratiques doivent faire l’objet d’informations ciblées et précises, afin que les personnes qui entendraient les adopter bénéficient d’un effort minimal d’éducation populaire visant à les prévenir des conséquences de leur choix sur leur santé », a ainsi insisté le député (LFI-Nupes) Hadrien Clouet en commission ;

–        en question également la liberté des patients en matière de choix thérapeutiques. « Le texte est sur une ligne de crête, tiraillé entre la protection des citoyens et la liberté d’expression », a ainsi relevé en commission le député Jean-François Coulomme (LFI-NUPES).

 

Le texte adopté : des avancées et des doutes

Adopté par 146 voix « pour », 104 voix « contre », le texte de loi est salué par Brigitte Liso (Renaissance) qui a souligné les autres « avancées majeures » contenues dans le projet de loi, parmi lesquelles :

        « la consécration législative de la Miviludes (…)

         Le renforcement des mesures sanctionnant les thérapies de conversion et l’amélioration apportée au soutien de leurs victimes,

        L’allongement du délai de prescription quand les victimes de dérives sectaires sont mineures,

         Le signalement aux ordres professionnels de santé des dérives que certains de leurs membres peuvent commettre au détriment de leurs patients »

Les doutes et oppositions persistent relativement à ce texte : Xavier Breton (Les Républicains), critiquant un texte « de plus en plus bricolé et de moins en moins lisible », a fait part des « inquiétudes » persistantes de son groupe le conduisant à s’abstenir. « La sur-pénalisation n’est aucunement la solution, et ne fera pas cesser les dérives sectaires », a quant a elle estimé Elisa Martin (La France insoumise), fustigeant un texte qui « promeut l’aggravation des peines au mépris des libertés fondamentales ».

 

Lutter contre les dérives thérapeutiques et sectaires reste une priorité pour les acteurs du bien-être et des pratiques de soins non conventionnelles.

L’arsenal législatif évolue et cela est vraisemblablement une réponse essentielle à ce phénomène qui constitue en tout premier lieu une mise en danger des citoyens et qui également, on peut le penser, nuit, à l’image de nos professions, et ce faisant contribue à altérer le développement de l’activité des professionnels ayant effectué des parcours de formation complets et sérieux et pratiquant en appliquant une déontologie professionnelle. Les retours de certains de nos adhérents convaincus que leurs clients « font la part des choses » ne permet de nuancer que partiellement ces craintes. La consécration de la Miviludes permet notamment que ce soit un organisme d’état qui veille à cette mission de service public.

L’arsenal législatif n’est cependant pas la seule réponse possible à apporter pour développer un parcours de santé et de bien-être global sécurisé pour les individus, réponses qui engagent tous les intervenants.

Un levier essentiel se situe au niveau de l’information des individus sur la nature des prestations des pratiques de soins non conventionnelles, sur les bénéfices qu’ils peuvent en retirer, les situations où ils peuvent consulter, la formation des professionnels et sur leurs limites avec la médecine et la santé conventionnelle, La liberté de choisir la pratique de soin ne peut s’appliquer que si les individus sont en capacité de faire un choix éclairé et cela engage notamment les professionnels et la clarté de leur communication sur la nature de la prestation de leurs services. Le SUP-H et ses adhérents sont engagés sur cet axe et continuent de développer des actions allant dans le sens d’une meilleure information des individus.

La reconnaissance de la normalisation des formations par les instances publiques nationales peut être une réponse également.  Pour être pertinente, elle engage bien-sûr les professionnels et les organismes de formation français : elle se place également au niveau international, les enseignements de l’hypnose et des thérapies brèves dépassant largement le cadre national et le contenu de ces formations étant déjà, en partie et par blocs, normé au niveau international.

 

Enfin les adhérents du SUP-H s’engagent à appliquer la déontologie professionnelle de professionnels de l’hypnose et des thérapies brèves. L’engagement et l’application effective par les professionnels des pratiques de soins non conventionnels d’une déontologie professionnelle écrite et partagée reste à ce jour un premier pas dont le développement servirait vraisemblablement également la lutte contre ces dérives. La protection des individus gagnerait vraisemblablement à ce que le gouvernement s’appuie aussi davantage sur ces syndicats, représentants légaux de ces professionnels et dont plus de 10 d’entre eux sont rassemblés au sein de la branche des professionnels du bien-être de la CNPL.